Chevalier de la Tour adoubé en 2010, Wilhem Höhner, directeur d’un lycée épiscopal près de Cologne en Allemagne est à l’origine de dons exceptionnels en faveur de notre patrimoine amandinois : vitraux pour les églises Saint-Martin et Sainte-Thérèse, autel et ambon pour Saint-Martin et encore les 1600 tuyaux venus de l’orgue de Kerpen. Il portait le titre de Monseigneur comme on le donne aux directeurs de lycées épiscopaux en Allemagne.

Wilhem Höhner est décédé le 10 décembre dernier. Un hommage solennel lui a été rendu le samedi 3 février 2024 à l’occasionne du rassemblements des « lieux dédiés au moine Amand » sous l’impulsion de l’association Amandicum.

A cette occasion Jean-Marc Bocquet, chevalier de la Tour et ancien doyen de Saint-Amand a retracé le parcours du donateur allemand livrant ainsi les clefs d’une générosité exceptionnelle dont a bénéficié notre cité. Notre Confrérie a perdu un ami, un chevalier exemplaire en sa personne et nous publions ici l’essentiel du texte de Jean-Marc Bocquet écrit pour lui rendre hommage 

« Depuis le premier rassemblement des lieux dédiés à Saint Amand, voici 20 ans, Wilhem Höhner a marqué une fidélité exemplaire à notre cité. Il n’a cessé de nous gratifier de cadeaux de la plus haute valeur, que nous pouvons contempler quand nous parcourons les sanctuaires amandinois. Nous l’avons interrogé sur cette générosité qu’il offrait à notre ville.

Son père, nourri par son expérience de la Première guerre mondiale, en conçut une véritable détestation de la guerre, du nationalisme et de la violence. Des sentiments qu’il a transmis à Wilhelm. Vingt ans après, enfant, il habitait un village où avait été créé un camp de prisonniers français. La propagande nationaliste leur avait dressé un tableau épouvantable des Français, présentés comme des sortes de monstres à ne surtout pas fréquenter, sous peine de punitions. En dépit des tabous, il retourna au camp, et discuta avec les prisonniers. Il se rendit vite compte que propagande n’était pas vérité. Il avait devant lui des êtres humains, avec une famille, capables d’empathie, de générosité et, souvent, croyants de la même foi que lui.

Le cœur de son engagement, dès lors, devint l’égale dignité de tout être humain. Son esprit, dès lors, se libéra de la propagande. Le voici, à sa mesure, résistant. Un esprit dont nous avons toujours, en ces temps d’intolérance et de rejet, le plus urgent besoin. Il était habité par ce sentiment de culpabilité transcendée qui imprègne les mentalités allemandes depuis 1945, que nous voudrions voir en France plus puissant, d’une relation de respect et de reconnaissance à restaurer, d’une dette à effacer par la solidarité et l’amitié rétablies. Sa façon à lui, ce fut de saisir l’occasion que formulait Amandicum, expression du rétablissement d’une conscience commune, fondée sur l’Histoire et la foi chrétienne. 

Pour accomplir le projet de paix européenne, il rassembla des amis, comme Mme Lukas et Mme Meurer. Il avait compris que, c’était les citoyens qui pouvaient transformer ce rêve en réalité, en jouant le jeu de l’amitié possible, de la fraternité rêvée par Schiller, dont les paroles sont devenues l’hymne européen : « Alle Menschen werden Brüder, wo dein sanfter Flügel weilt » « Tous les humains deviennent frères, où, joie, plane ton esprit de douceur. » 

Saint-Amand a eu l’honneur de donner corps à cet esprit. De surprenantes découvertes nous ont encouragés sur cette voie : le blason du chapitre de la cathédrale d’Aix-la-Chapelle est le même que celui de l’abbaye de St Amand. Car la paix commence chez nous, dans nos familles, dans nos écoles, dans nos associations, par les échanges, les jumelages. 

Cette journée est une occasion de faire mémoire. La présence de nos amis allemands et belges est une concrétisation de l’Europe pacifique que nous désirons. Mais aussi les multiples cadeaux que nous devons à la générosité de nos amis allemands. Notre quotidien, ainsi, se transforme en fête, en couleur, en harmonie. Mgr Höhner a été adoubé Chevalier de la Tour. Signe de la gratitude des Amandinois. Mon désir est qu’elle ne s’oublie pas. » J.-M B.

Illustration : Les chevaliers présents autour de Jean-Marc Bocquet